Des champignons magiques aux médicaments de pointe
L’amanite tue-mouches (Amanita muscaria)
Est un champignon toxique très répandu en Europe et en Amérique du Nord. Il est traditionnellement utilisé par les chamans des tribus indiennes du Nord-ouest des Etats-Unis pour entrer en contact avec les esprits. Mastiqué ou consommé en extrait, il entraîne excitation, hallucinations, et augmentation de la libido. Ces effets sont dû en partie à une substance, le muscimol, dont un analogue, le THIP est étudié pour son activité analgésique, proche de la morphine.
L’ergot du seigle ((Secale cereale)
Est un champignon parasite des céréales, dont la consommation fit de terribles ravages au Moyen-Age. Les victimes du « Feu sacré » périssaient de gangrène. Les plus chanceux étaient estropiés à vie. L’ergot contient des alcaloïdes dérivés de l’acide lysergique qui provoquent une contraction des fibres lisses réglant le calibre des vaisseaux (vasoconstriction). Cette contraction peut-être intense et provoquer une brusque diminution de l’irrigation des tissus entraînant une gangrène. Par hydrogénation, les alcaloïdes de l’ergot perdent leurs propriétés, et acquièrent des effets vasodilatateurs. Ils sont aujourd’hui utilisés pour traiter l’hypertension, la migraine et les troubles du système nerveux à l’instar de la dihydroergotoxine.
L’acide lysergique de l’ergot de seigle a été utilisé par deux chimistes des laboratoires suisses Sandoz – Stoll et Hofmann – pour donner naissance dès les années 30, à une série de 27 corps de synthèse. Le vingt-cinquième vit le jour en 1938. Il s’agissait du diéthylamide de l’acide D-lysergique, ou… LSD 25.
Parce qu’ils avaient l’habitude de ramener en Suisse un peu de la terre de leur lieu de villégiature, les chimistes des laboratoires Sandoz furent un jour amenés à se pencher sur la découverte d’un des leurs, de retour du plateau de Hardangger, en Norvège. Le champignon en question, Tolypocladium Inflatum contenait un antibiotique faiblement actif, mais cette molécule devait se révéler capable de déprimer de manière impressionnante le système immunitaire de la souris par une action sur les cellules-T. Dans les années 1980, sa structure était établie. Elle devait donner naissance à la ciclosporine, un médicament de premier plan pour minimiser les phénomènes de rejet après une greffe.
Source:
J-M. Pelt : Drogues et plantes magiques, Fayard 1983. Noël Arpin